Jeu et apprentissage : une équation gagnante !

Jeux d’imitation.
Jeux d’exploration.
Jeux de construction et de manipulation.
Jeux fabriqués et inventés.
Jeux de société…

Peu importe la forme que prennent leurs jeux, les enfants jouent dès leur plus jeune âge. Ou plutôt, ils apprennent !

Il est notamment possible de définir le jeu selon une typologie permettant d’identifier :

  • le jeu libre,
  • le jeu dirigé (proposé par un adulte)
  • et le jeu régi par des règles (comme peut l’être, par exemple, un jeu de société).

Mais libre ou guidé, le jeu permet d’acquérir des connaissances. 

Comme le rappelle, sur son site, l’académie de Paris, le jeu « favorise la richesse des expériences vécues des enfants et alimente tous les domaines d’apprentissages. Il permet l’exercice de l’autonomie, l’action sur le réel, l’élaboration de fictions, le développement de l’imaginaire, la communication avec les autres. »

Arrêtons-nous sur le jeu libre. Celui qui est initié, dirigé et contrôlé par l’enfant qui décide lui-même de la forme du jeu, du matériel utilisé, de l’espace de jeu, du rythme et/ou des règles…

Le jeu libre pour découvrir le monde

Lorsque l’on parle d’apprentissage, ce type de jeu non contraint présente de nombreuses vertus mises en avant par les experts. L’idée sous-jacente : on apprend dans des situations qui ne sont pas faites pour apprendre.

Comme l’indique l’universitaire spécialiste des sciences du jeu Gilles Brougère à l’occasion d’une intervention filmée pour la Bibliothèque publique d’information du centre Georges Pompidou, à Paris, cela relève de l’apprentissage informel que l’on peut observer avec n’importe quelle pratique sociale.

Selon lui, toutes les pratiques sociales (regarder la télévision, se promener dans la rue, discuter, interagir avec des personnes, etc.) – dont le jeu fait partie – peuvent permettre d’apprendre d’une façon qui peut être consciente ou non, de façon fortuite souvent (même si ce n’est pas toujours le cas). Elles ne sont pas façonnées, construites comme une situation éducative – la promenade, le jeu ou regarder un divertissement l’emportent sur la volonté d’apprendre – mais il n’en demeure pas moins qu’elles peuvent permettre d’apprendre.

Prenons le cas des compétences mathématiques.

Des chercheurs ont analysé des vidéos montrant 90 enfants âgés de 4 ou 5 ans, en train de jouer pendant un quart d’heure, afin de déterminer des pratiques liées aux mathématiques dans leurs jeux de tous les jours. Ils ont identifié six catégories de disciplines mathématiques mises en situation :

  • la classification
  • la comparaison de la taille des objets
  • l’énumération
  • assembler ou séparer les parties d’objets
  • les motifs et formes (fabriquer un collier de perles selon un motif particulier, par exemple)
  • l’orientation dans l’espace (décrire une direction ou un emplacement)

Les auteurs de cette étude intitulée « Jouer pour apprendre les mathématiques » concluent :  « la plage de notions mathématiques se dégageant de cette étude était impressionnante, tout comme la fréquence avec laquelle les enfants s’engageaient dans des activités mathématiques. Au moins 88% des enfants ont participé à au moins une activité mathématique pendant ces 15 minutes ».

Quid des jeux dirigés (lorsqu’il s’agit de faire jouer) et surtout des jeux dits éducatifs ?

Caroline Jambon qui édite le site apprendre-reviser-memoriser.fr mentionne, par exemple, l’ouvrage (non traduit en français) de Kathy Hirsh-Pasek et Roberta Michnick Glinkoff au titre explicite : Einstein never used flash cards : How Our Children Really Learn – And Why They Need to Play More and Memorize Less. Un ouvrage qui (ré)affirme l’importance du jeu libre chez les enfants et avertit sur les risques liés à une sur-stimulation des enfants.

Le jeu éducatif – vise à transmettre des savoirs par le mécanisme du jeu – est-il pour autant à bannir ? À titre personnel, je pense que non. S’il n’est pas utilisé à outrance et s’il est amusant, il peut selon moi favoriser les apprentissages pour plusieurs raisons :

  • les moments de détente sont des moments privilégiés, les enfants apprennent mieux s’ils sont détendus plutôt qu’en situation de stress,
  • un lien étroit entre émotion et cognition est aujourd’hui mis en avant par les scientifiques et les experts. Les émotions positives favorisent les apprentissages. Or, le jeu est associé à un moment-plaisir (où le stress n’est pas de la partie !) pour la majorité des enfants. Ces moments-plaisirs déclenchent une sécrétion de dopamine, une hormone qui provoque une sensation agréable et permet aussi de stocker l’information qui mènera, plus tard, de nouveau à cette sensation.
  • dans le jeu, les erreurs ne sont pas considérées comme des fautes sanctionnables, mais plutôt comme des phases normales du jeu ; il n’y a ainsi pas lieu d’être angoissé,
  • Et si les parties engagées invitent à rire, c’est alors l’endorphine qui est libérée avec, à la clé, une sensation agréable !

Dans les classes de maternelle, les coins jeux offrent aux enfants des possibilités d’imiter, d’échanger, d’apprendre. Certains enseignants de CP jusqu’en CM2 misent également sur le jeu et même plus tard au collège, voire au lycée.

L’utilisation de jeux ou supports ludiques n’est pas systématique et dépend de l’intérêt des professeurs pour ce type de ressources, ainsi que de leur perception de ce que peuvent apporter les jeux en matière d’enseignement.

Pour autant, certaines méthodes d’enseignement prônent la manipulation et le jeu pour enseigner ou consolider les connaissances. C’est notamment le cas, en mathématiques, de la méthode MHM (Méthode heuristique des mathématiques). Cette méthode, considérée comme innovante, a été mise au point par Nicolas Pinel, un ancien conseiller pédagogique devenu inspecteur de l’éducation nationale.

Elle suit les programmes scolaires en proposant des manipulations et des séances de jeux en atelier ; elle permet également de replacer des notions mathématiques dans un contexte familier afin de connecter les maths à la réalité. « Mes élèves sont ravis et heureux de faire des maths. Ils n’ont plus peur d’en faire car chacun peut trouver sa place. Ils se régalent à manipuler la fausse monnaie, à revisiter le jeu de la bataille pour apprendre à calculer, à jouer et apprendre ensemble », témoigne une enseignante sur son blog.

Au-delà des enseignants qui suivent cette méthode, d’autres professeurs des écoles sont des adeptes du jeu en classe, en particulier du jeu de société, à l’image de Mathieu Quénée, qui tient Le blog de monsieur Mathieu et dont la page Facebook est suivie par quelque 50 000 personnes !

À ce titre, les arguments en faveur de l’utilisation du jeu et des jeux société en classe sont pluriels :

  • Le jeu motive les élèves qui anticipent un moment de plaisir
  • Grâce au jeu, les enfants sont actifs
  • Le jeu apprend à travailler en groupe, à la collaborer
  • Le jeu permet d’analyser et de structurer ses actions
  • Le jeu offre la possibilité d’acquérir un jugement critique
  • La répétition de certaines actions aide à mémoriser les notions mises en avant grâce au jeu
  • La part de hasard, souvent présente dans les jeux de société, permet à tous les enfants d’avoir une chance de gagner même si leur niveau est faible. Cela peut les encourager à persister et leur permettre de regagner confiance en eux.
  • Lorsque les enfants jouent en équipe aux côtés de camarades plus à l’aise, ils peuvent tirer bénéfice de cette collaboration
  • Le jeu engage les élèves à s’exprimer et à argumenter, ce qui représente un atout pour le développement du langage et la confiance en soi
  • Grâce au jeu, l’enseignant change de posture et ne détient plus seul le savoir

Cette liste n’est bien sûr pas exhaustive.

Dans le cadre de sa formation d’enseignante, Aline Vergoni est l’auteure d’un mémoire sur l’apport des réglettes Cuisenaire – un matériel pédagogique sous forme de réglettes de couleur : « cette entrée par le jeu et le plaisir de manipuler les réglettes Cuisenaire permet aux élèves de s’affranchir de toute idée négative, voire sclérosante, à propos des mathématiques. La motivation intrinsèque est ainsi maximale et forme le terreau sur lequel l’élève va bâtir ses apprentissages avec envie et succès. »

À titre personnel, cela représente bien l’apport du jeu en classe, en particulier pour les mathématiques.

Créer des situations ludiques

De nombreux jeux de société qui permettent de faire des mathématiques en s’amusant sont mentionnés sur le blog 6foisplus. Citons, par exemple, Tam Tam Super Plus pour les additions, Top 10 ! pour les compléments à 10, MathSumo pour les tables de multiplication ou FractoDingo pour les fractions (cité ici).

Mais il est par ailleurs tout à fait possible de faire des additions, des soustractions ou des multiplications en s’amusant avec un simple jeu de cartes traditionnel. Je développe cette idée ici : https://6foisplus.com/jeu-cartes-traditionnel.

Memory, Mistigri, Dominos : construire son propre jeu est tout aussi envisageable ! Je vous encourage, par exemple, à réaliser des jeux de memory pour apprendre en s’amusant !

Selon moi, créer des situations ludiques n’est pas compliqué et représente une voie à explorer en famille pour apprendre ou réviser toute notion scolaire.


Qu’en est-il pour vous ? Jouez-vous en famille pour aider vos enfants à apprendre et mémoriser certaines notions mathématiques ou certaines règles grammaticales ? 

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *